MINE DE RIEN

MAURO PINTO

Mine de rien 

Série Blackmoney I et II

Il existe des lieux que l’on traverse sans vraiment les voir. Des vies qui se déploient dans l’ombre, invisibles, et pourtant intenses. Dans les mines artisanales du Mozambique, l’économie souterraine invente ses propres règles. Ici, chaque geste creuse l’espace, chaque corps imprime sa présence. Les séries Blackmoney I et II ne se limitent pas à un reportage social : elles transforment la mine en théâtre, où lumière et obscurité deviennent acteurs.

Les corps émergent des ténèbres avec une dignité obstinée. Les visages, fatigués mais fiers, racontent une résistance silencieuse. Les mains, les outils, la poussière : tout devient sculpture, tout devient rythme. L’ombre caravagesque traverse les portraits, les noirs profonds évoquent Soulages, et la rigueur des compositions rappelle le modernisme photographique. Chaque image est un fragment d’univers, à la fois fragile et intense, intime et universel.

Regarder Blackmoney, c’est descendre sous la surface. Entendre le silence des galeries, sentir l’humidité, percevoir les murs qui parlent, les regards qui résistent. Entre éclats de rire et fatigue, l’art révèle ce que la lumière seule ne montre pas : les liens invisibles qui unissent les êtres, « mine de rien », dans leur commune humanité.

Jean-Yvon LAFINESTRE